la cage

LA CAGE

Devant moi, à 100 m, j ' aperçois une grande porte métallique ,style entrée de garage avec au dessus une double rangée de barbelé, une cour sur la droite et une sur la gauche, et déjà, à près de 5 m de haut , les bruits de cette nouvelle taule viennent me vriller les oreilles ! je n'ai pas peur, mais comme partout, une appréhension est née en même temps qu'un flot d' angoisses incontrôlées et incontrôlables!!

J'ai froid et faim mais les sensations qui m'envahissent sont plus fortes ...je sais que mon regard a changé et que l'envie de cogner se lie sur mon visage, que mes yeux en disent plus que toutes les paroles que je pourrais dire ; j'ai plus qu'une seule envie : tout casser, frapper tout et n'importe quoi ! oui, la haine est là de nouveau ...

Des grilles parcourent chaque allées et cela ressemble à ce que l'on voit dans les cirque au moment ou les fauves vont faire leur entrée dans l'arène : dans ma tête j'imagine mon dresseur habillé de bleu, un fouet à la main et une baguette dans l'autre : la rage monte encore et je ne peux me retenir de dire au maton

<<  faute de lions, vous vous amusez avec des hommes et vous pensez avoir déjà gagné ?  alors tu diras au patron de ce zoo que je suis enragé et que mes dents et ma haine sont a votre service!!! je vous la crache à la gueule, bande d' enculés !!!>>

Là, je vois son visage changer de couleur : il ralentit de façon à être derrière moi : une porte s'ouvre sur le coté droit et trois autre matons m'entourent : ils me guident vers des escaliers qui descendent sur deux étages . Une autre porte s'ouvre mécaniquement sur ma droite : il y a un silence qu'on ne rencontre que dans les hôpitaux ; une rangée de néons éclairent deux long couloirs ; entre les deux, un guichet entouré de verre protège trois tables avec des ordinateurs et un tas d'écrans : il y a des cameras partout . Le gradé est un type très grand et costaud et même s'il ne voulait pas m' impressionner, il le ferait quand même : 1,95m pour 100 à 120kg de muscles !!! il me fait entrer dans une pièce sur ma droite, pour être reçu par la direction. Je me surprends à lui répondre que je me fous de sa direction et de tout ce qui va avec!!  Mais je n'ai pas le temps d'en dire plus que je suis au sol, un genou dans le dos, les menottes remisent,  et sans ménagement, je suis relevé avec quelques coups de pieds ou de genou sur le côté de la cuisse, une béquille qu' ils appellent ça !!! ... pour le coup c'est moi qui en aurais besoin d'une, mais médicale celle- ci, car je ne peux plus marcher tant la douleur est intense ; j' ai les larmes aux yeux et la respiration coupée! Je ne peux rien faire, même pas parler, alors on me jette dans le bureau et je m' écrase dans des chaises ; je m' affale par terre sans pouvoir faire un geste de protection , j'ai mal partout!!! .

Un rire de femme retentit et une voix me dit

<<  alors c'est vous qu'il faut mater ? vous ne tenez même pas sur vos jambes et vous jouez les durs  >>

pas un mot ne sort de ma bouche, j'ai trop mal ; les matons m' agrippent et me portent ; la femme que je n'ai pas encore vue me crit

<< on se reverra demain !!! vous serez moins violent  >>

Ben merde alors !!! je me fais défoncer la gueule et c'est moi qui suis violent ! Démenotté, je suis poussè dans une cellule où règne une forte odeur d'urine et autres excréments ,(pour ne pas dire de merde) ,c'est terrible l'odeur qu'il y a là dedans .

Je me traine comme je peux à la fenêtre, ma jambe me fait terriblement mal, j'ouvre et respire un peu d'air frais : c'est pas grand chose mais c'est bon !! .le robinet est dans un tel état que je n'ose pas boire malgré la soif qui me tenaille ; avec ma veste de survêtement je nettoie un peu et fait couler un petit filet d'eau : je bois encore et encore... ,bordel que c'est bon !!

un matelas crasseux est posé sur le lit et malgré la saleté je m'y allonge : je suis presque bien!!! mes yeux se ferment... ma tête bourdonne ...je ne sens plus mon corps .exténué, je m'endors .

* 6 H du matin: j' ai dormi comme jamais mais une odeur de crasse me rappelle où je suis! alors sans attendre je me lève et vais a la fenêtre : en face il y a un grand bâtiment et je devine que derrière chaque grilles il y a des cellules ; à ma droite j' aperçois un terrain de sport et un grand abri en taule comme on en voit sur les chantiers ( j'apprendrais plus tard que c'est le complexe sportif du centre de détention )à ma gauche deux autres bâtiments semblables au premier, mais les deux s'étirent sur plus de 150m sur trois étages pour l'un et quatre pour l'autre. Je suis donc dans le CD qui est tout proche de Tulle. Sa réputation n' est plus à faire il est classé comme semi disciplinaire et n'y viennent que les détenus difficiles ou à risques; vers 7h j'entends les clefs qui ouvrent les portes des cellules et presque en même temps, de la musique commence à prendre la place de ce silence si cher dans ces lieux.

Ma porte s'ouvre et un maton me m' ordonne de sortir la poubelle devant ma porte dans le couloir, ce que je fais sans regrets car elle déborde de détritus ; j'en profite pour demander si je peux avoir de quoi faire un peu de nettoyage : le surveillant me regarde, surpris, et me répond qu'il m' apporte tout ce qu'il faut ! les détenus mis ici ne lavaient pas de si bonne heure mais que ma demande sera satisfaite ; effectivement, quelques minutes plus tard, il revient avec de la Javel, deux éponges et de quoi passer le balai et la serpillière!!! je me mets au travail de bon coeur car je ne veux pas rester dans cette saleté : je frotte et astique du sol au plafond : je suis content et fiert de moi. La porte s'ouvre à nouveau : un mec me tend un bol et de quoi déjeuner : café, pain, beurre ; il me donne également un récipient pour mettre de l'eau chaude ,(c'est mieux pour boire le café me dit - il) ,j'avale plus que je ne déguste car la faim est toujours bien présente ; ma cuisse me rappelle l'épisode de la veille car j'ai toujours mal, mais j'ai encore du travail pour rendre cet endroit vivable ; donc je fais avec ma douleur et me remets à frotter ; l'opération nettoyage va durer jusqu'à 12h30, mais c'est propre et ça sens presque bon!!! ...

Le C D est réveillé et des bruits m' arrivent de toute part : c'est la vie de toutes les prisons de France : sans bruit ce ne serait plus pareil. Dans la tête de tous et au travers des différents styles de musique, il y a un peu du dehors qui revient, mais c'est un mélange insupportable pour une personne qui n'en n' a pas l'habitude .